En ligne le 16 avril 2012
Une météo détestable en ce moment m'empêche de faire des balades comme je le souhaiterais. Pluie continuelle, averses de neige, sols détrempés, le tout dans un vent glacial, sans répit... Non vraiment, il y a des jours d'hiver bien plus agréables et propices aux sorties... La boue ne me fait pas peur, mais là on ne peut même plus parler de boue, c'est un ruissellement terreux ininterrompu. Et pas question de prendre la voiture pour aller voir plus haut : les "champs lumineux et sereins" sont désespérément bouchés. Qu'est-ce que je disais : je viens de voir à la télé que la route d'Andorre est coupée... trop de neige !
Alors, guettant la moindre petite éclaircie, réduite à quelques kilomètres d'asphalte auxquels on peut ajouter des pistes forestières (en les choisissant bien), j'achète des bâtons de marche nordique et je me lance dans ce que je crois être un pis-aller, au mieux un substitut qui me permettra de ne pas trop me rouiller.
Et je découvre que non seulement c'est sportif (je reviens "trempe" après 1heure de bonne allure), mais que, en fait, si on met de côté la jouissance du paysage, ça n'a rien à voir avec la rando en montagne dont j'ai l'habitude. Il faut tout réapprendre ! Et presque tout faire à l'envers...
Enfiler des drôles de gantelets - alors que je supprime systématiquement les dragonnes de mes bâtons de rando tant je les trouve dangereuses. Allonger le pas en montée et le réduire en descente... N'emporter qu'un mini sac, ou même une espèce de ceinture pour la petite bouteille d'eau et le kleenex. Au diable la pharmacie, le pull de secours, et tous les bidules et grigris, d'ailleurs on n'en a pas besoin : on part pour une heure, une heure et demie, de préférence sur un profil confortable et familier, pas trop pentu. Et - comble de l'hérésie - chausser des chaussures basses !
Décidément, il fallait une météo catastrophique pour me faire adopter tout ça, surtout ici. Pour un peu, je me croirais dans un parc urbain, bien clean.
Je ne suis tout de même pas allée jusqu'à revêtir un collant : pourquoi pas me mettre au jogging pendant qu'on y est ?
Eh bien non, justement, c'est ça qui m'a conquise, le petit clin d'oeil au jogging pour faire juste le contraire.
Clin d'oeil au jogging, avec son équipement "libellule", ses couleurs fluo et pastel-minette que j'adore détester, ses runnings et autres godasses de trail qui coûtent presque aussi cher que des vraies grolles de montagne, ses itinéraires sans boussole et sans carte parce qu'on n'y sort jamais vraiment de l'aire domestique, son idéologie bobo "le sport sans risque tout près de chez vous, changez-vous les idées ou mieux, videz-vous la tête", son obsession pour la "technique correcte" où l emot "correct" est aussi une prescription morale (1).
Mais évitement. On y conserve la gravité du pas, qui s'exalte, qui s'allonge, qui se redécouvre avec son balancement, son oscillement du bassin, sa torsion des épaules. On y bannit les stupides chocs sur le talon. On n'a pas les yeux rivés sur le podomètre, on n'est pas piégé par le narcissisme de la performance, on est dehors, pas seulement pour prendre l'air et faire fonctionner son système cardio, mais pour être dehors et voir ce qu'il ya à voir, humer ce qu'il ya à humer. Humer, s'adonner à une marche didactique en attendant de pouvoir reprendre l'allure de la montagne.
1 - Ma vidéo préférée est américaine. Un régal, sur un ton de "commercial" moelleux et glamour dont les Américains ont le secret, vous comprenez tout, vous savez exactement ce qu'il faut faire et comment le faire, et en plus vous vous imprégnez de santé, corps et âme ! C'est fascinant, je ne me lasse pas de la regarder : http://www.youtube.com/watch?v=fJY6_DLJ2Kg
Celle-ci n'est pas mal non plus, dans un genre plus minimaliste avec une pointe d'abstraction : http://www.youtube.com/watch?v=EuuCAipLeQY&feature=related